Dans toute gamme optique, le classique télézoom 70-200 mm est une pièce emblématique du fait de sa polyvalence. Photographie de scène ou de sport, portrait ou encore prise de vue de détail en paysage, tout lui convient ! Autant de raisons qui justifient le fait de le choisir avec discernement.
Chaque grande marque de matériel photo a intégré depuis longtemps à son catalogue au moins un modèle de 70-200 mm (ou équivalent pour les matériels équipés d’un capteur APS-C ou Micro 4/3). Les opticiens complémentaires ont alors rapidement emboîté le pas des leaders et le choix en la matière s’avère désormais pléthorique. Tous ces modèles se regroupent en deux catégories, celle des optiques ouvrant à f/2,8 et celle de leurs petits frères limités à f/4. Chacune d’elles a ses avantages et ses inconvénients.
Ainsi, les plus lumineux (f/2,8) facilitent le travail en faible lumière et permettent d’obtenir une plus faible profondeur de champ mais, en contrepartie, sont plus chers (700 à 1 400 euros chez les opticiens indépendants, 2 000 à 3 000 euros chez les grandes marques) et plus lourds (1,3 à 1,5 kg) que leurs homologues ouverts à f/4 (1 300 à 1 500 euros, 0,8 à 1 kg). Le critère de l’ouverture nominale est sans doute le premier paramètre à prendre en compte dans le choix d’un 70-200 mm. Vient ensuite celui de la stabilisation optique qui s’avère toujours très utile dès lors que le sujet est immobile. En effet, bien que très efficace, la stabilisation atténue le risque de flou de bougé induit par les éventuels tremblements du photographe lors de l’emploi d’un temps de pose long, mais ne peut rien contre les mouvements du sujet. De fait, son intérêt pratique dépend grandement du sujet traité, tout en gardant à l’esprit qu’un télézoom stabilisé est toujours plus polyvalent qu’un autre qui ne l’est pas.
Aux deux critères que nous venons d’évoquer, d’ordre purement technique et pragmatique, s’ajoutent des facteurs plus suggestifs propres à chaque photographe :
– marque : le choix d’un objectif de la même marque que votre boîtier, que ce dernier soit un reflex ou un hybride donne à l’ensemble une grande cohérence. L’ergonomie et la communication entre l’optique et l’appareil photo sont alors optimales. A contrario, opter pour un télézoom fabriqué par un opticien indépendant (Sigma, Tamron, Tokina et autres) exige un investissement moindre, mais présente le risque de former avec votre boîtier un ensemble globalement moins abouti sur le plan ergonomique (point souvent négligé lors de l’achat). Ainsi, l’équilibre et la tenue en main du couple boîtier-optique ne sont pas forcément optimals, en conséquence du fait que tout objectif d’un opticien indépendant est décliné pour plusieurs marques d’appareils qui diffèrent entre eux par leur forme et par leur ergonomie. Il n’est donc pas certain qu’un tel zoom forme un duo harmonieux avec tous les appareils pour lesquels il a été développé. De même, les commandes, et notamment les bagues (dont la rotation s’effectue parfois dans le sens opposé à celui des bagues d’un objectif de la marque de votre appareil), peuvent initialement perturber les habitudes et donc nécessiter un temps d’adaptation avant d’obtenir les meilleurs résultats. En outre, la compatibilité est théoriquement assurée avec les boîtiers d’une marque au moment de l’achat, mais n’est cependant pas garantie avec leurs futurs remplaçants, les protocoles de communication entre le boîtier et l’objectif étant susceptibles de changer au fil des évolutions technologiques. Ce dernier point, bien que peu fréquent, mérite cependant d’être pris en compte avant de faire votre choix.
– qualité de fabrication : les télézooms haut de gamme des grandes marques bénéficient tous d’une très belle qualité de construction. La tropicalisation, axée sur la conjugaison de joints toriques et d’ajustements mécaniques de haute précision, est désormais devenue la « norme ». De leur côté, les opticiens indépendants, forts de ce constat, redoublent d’efforts pour réduire à peau de chagrin l’écart qui sépare la « qualité perçue » de leurs produits de celle affichée par les optiques des leaders. C’est notamment le cas de Sigma et de Tamron qui, ces dernières années, ont fait de gros efforts pour rendre leurs zooms très attractifs, en les dotant des derniers perfectionnements technologiques. Ainsi, si la qualité de construction de leurs premiers 70-200 mm f/2,8 n’étaient clairement pas à la hauteur de leurs équivalents Canon ou Nikon, force est d’admettre que les modèles actuels bénéficient d’une excellente fabrication.
– performances optiques : quand on parle de qualité optique, on pense immédiatement au piqué, combinaison du pouvoir de résolution et du contraste de l’objectif. Il n’est donc guère étonnant que les revues spécialisées (Chasseur d’Images, Réponse Photo, Le Monde de la Photo pour ne citer que les plus connues) mettent l’accent sur ce critère dans leurs tests d’objectifs. Or, s’il est évident que seul un objectif « piqué » permet de restituer sur l’image les plus fins détails du sujet, il faut toutefois garder à l’esprit que la qualité optique ne se limite pas à ce seul facteur. D’autres paramètres comme le vignetage, la distorsion ou les aberrations chromatiques, aisément mesurables, sont aussi à prendre en compte. Chacun de ces points, bien que souvent jugés secondaires par beaucoup, peut revêtir un aspect crucial en fonction du sujet de prédilection traité. Par exemple, la maîtrise de la distorsion est essentielle pour un aficionado de la photographie architecturale (fort heureusement tous les 70-200 mm récents sont performants sur ce point). Se référer à un bon test, qu’il soit publié dans la presse ou sur Internet, permet donc de se faire une bonne idée de la qualité optique d’un objectif, mais n’en livre pas tous les secrets.
J’ai cependant toujours émis une réserve sur les protocoles de tests fondés uniquement sur la photographie d’une mire à très haut contraste (1000 : 1) de type DxO ou autres, car ils minimisent la perte de piqué souvent constatée sur les objectifs d’entrée ou de milieu de gamme, et les favorisent donc un peu par rapport aux meilleures optiques, ce qui aboutit à une certaine « uniformisation » des résultats. C’est la raison pour laquelle en d’autres temps, deux protocoles de tests étaient appliqués en parallèle : l’un fondé sur une mire à fort contraste (1000 : 1) et l’autre sur une mire à faible contraste (1,6 : 1). Or, des deux méthodes, les résultats donnés par la seconde m’ont toujours parus être les plus proches de ce que je constate en pratique sur le terrain. De plus, via une mire à fort contraste, et notamment aux plus grandes ouvertures, il n’est pas toujours évident de savoir si un résultat jugé moyen est le fruit d’un pouvoir de résolution modéré ou d’un contraste faible. Or, si le contraste peut toujours être réajusté en post-production, tel n’est pas le cas d’un faible pouvoir de résolution (l’accentuation, sous Photoshop ou tout autre logiciel est utile pour renforcer les détails enregistrés, mais elle ne peut pas en créer).
Enfin, le rendu chromatique, bien que souvent négligé par beaucoup de testeurs, fait néanmoins partie des critères à prendre en compte avant l’achat d’un objectif, notamment si vous avez déjà une gamme optique assez développée et que vous privilégiez une certaine homogénéité de restitution des couleurs entre vos différents « cailloux ». Comme toujours, c’est à chacun de se faire une opinion en fonction de ses propres exigences et de ses critères.
– rendu optique « non mesurable » : considérer que la qualité optique d’un objectif est définie par ses seules performances optiques quantifiables est très réducteur. D’autres facteurs, bien que difficilement pondérables, voire même immesurables, sont également à prendre en compte. C’est notamment le cas du « bokeh » (terme issu du mot japonais boke que nous traduisons par flou) si cher aux portraitistes, qui traduit la manière dont la transition entre zones nettes et floues s’opère. Le bokeh est soyeux et doux quand elle se fait de manière progressive et fluide et, a contrario, il est qualifié de rugueux ou dur en cas de passage brutal de la netteté au flou, ce dernier résultat étant toujours moins esthétique que le premier.
– autofocus : délaissons un peu l’important critère de la qualité d’image pour nous pencher sur celui de la mise au point automatique. Certes tous les zooms 70-200 mm de dernière génération intègrent un moteur ultrasonique autorisant la retouche manuelle du point sans débrayage de l’autofocus, mais les performances offertes en matière de rapidité et de précision n’en sont pas pour autant identiques d’un modèle à l’autre, notamment en basse lumière ou en cas de faible contraste d’éclairage de la scène photographiée : à vérifier autant que possible avant tout achat.
– accessoires fournis : tous les objectifs sont livrés avec leurs bouchons avant et arrière mais tel n’est pas systématiquement le cas des autres accessoires. Pare-soleil, étui, collier de trépied sont parfois optionnels et augmentent alors le coût total de l’optique.
L’évaluation précise de chacun des points que nous venons d’évoquer en fonction de vos priorités et de vos exigences devrait vous permettre de bien choisir votre 70-200 mm.
Pascal Druel

Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure Louis Lumière, amoureux d’images et photographe au quotidien, j’explore depuis plus de 30 ans la photographie sous diverses formes (prise de vue, développement et tirage argentique, contrôle qualité, repique, traitement et retouche numérique, graphiste, prise de vue, formateur, photographe indépendant). En outre, je collabore occasionnellement avec Chasseur d’Images (magazine pour lequel j’ai été rédacteur pendant une douzaine d’années), signe des ouvrages (publiés aux Editions Eyrolles), réalise de multiples prestations photographiques (books, reportages, mariages) et couvre en images de nombreux festivals et concerts (150 à 200 scènes par an).