La quinzième édition du Motocultor Festival, qui s’est tenue pour la deuxième fois consécutive à Carhaix, dans le Finistère, fut un réel succès. Ainsi, malgré des conditions météorologiques capricieuses, près de 54 000 festivaliers, soit autant que l’année précédente, répondirent à l’appel. Témoignage…
La première nouveauté constatée lors de cette édition 2024 du Motocultor fut la création d’une entrée VIP : une heureuse initiative qui, après la pose des bracelets, nous permit de pénétrer rapidement sur le site sans déranger les festivaliers. La configuration des scènes a également été modifiée : les deux scènes couvertes, Massey Ferguscène et Bruce Dickinscène, sont regroupées à proximité de l’entrée des festivaliers, tandis que les deux scènes ouvertes Dave Mustage et Suppositor Stage (cette dernière est nettement plus grande qu’elle ne le fut les années précédentes) prennent place côte à côte, à l’autre bout du site, à proximité de l’espace VIP.
Mais l’innovation la plus imposante résida dans la tribune VIP qui offrit aux festivaliers ayant fait le choix de payer un supplément pour y accéder, une vue imprenable sur la Dave Mustage, ainsi qu’un accès à l’espace VIP. Malheureusement c’est là que le bât blessa, car ce nouvel afflux de quelques centaines de « festivaliers VIP » se fit sans que l’espace concerné n’ait bénéficié du moindre aménagement supplémentaire. De ce fait, le petit bloc sanitaire, mais aussi le bar VIP, l’unique foodtruck VIP et la petite trentaine de places assises (pour plusieurs centaines de personnes) furent continuellement pris d’assaut. La situation atteignit son paroxysme durant les phases pluvieuses, les gens s’agglutinant les uns aux autres sous le chapiteau du bar VIP. Entendons-nous bien, si la tribune VIP constitue en soi une option intéressante pour les festivaliers désireux d’apporter un soutien supplémentaire au festival, il serait alors de bon ton qu’à l’avenir l’espace VIP évolue en conséquence pour le confort de chacun. Parmi les autres nouveautés, signalons également la création d’un vaste espace de restauration, situé en retrait des deux scènes principales, et l’heureuse initiative de remplacer enfin, sur la carte des différents bars, les bières Bavaria au profit de la production de brasseries bretonnes, telles que Coreff.
Côté concerts, force est d’admettre que comme chaque année, la diversité et la pluralité artistiques furent de mise, pour le plus grand bonheur des festivaliers. De mon côté, j’ai ouvert le bal par le set des américains de Shy Low :leur post metal, sans m’avoir ennuyé, ne me laissa pas un souvenir impérissable. J’enchaînais avec le concert de Dewolf, dont le rock psychédélique de bon aloi s’avèra intéressant et très musical. Ce fut une bonne découverte, d’autant que les néerlandais sont très expressifs sur scène et vivent clairement leurs morceaux.
Je changeai ensuite totalement de registre devant Uada. Ces américains évoluent résolument dans un registre black metal dont les compositions, mélodieuses et bien écrites, font mouche. Un bon concert, même si j’avoue éprouver une certaine lassitude à photographier des musiciens qui cachent leurs visages sous des cagoules ou des masques. Je fais ensuite un bref passage dans le pit de la Dave Mustage, en couverture du concert de Squid qui fut un peu trop tranquille à mon goût, surtout quand on sait que ces anglais sont des habitués de la mouvance post-punk. Quel contraste avec le set des thrasheurs américains de Havok qui déborda d’énergie. En outre, les musiciens, aux expressions faciales très affirmées, ajoutèrent à leur très belle prestation musicale une touche visuelle de bon aloi : une bonne façon de fêter les vingt ans d’existence de leur quatuor. Ce fut assurément l’un des mes meilleurs moments de cette première journée du Motocultor 2024.
Je m’offris ensuite une petite pause, avant de continuer ma moisson d’images par le concert d’Emma Ruth Rundle, dont l’atmosphère feutrée, bien servie par des éclairages intimistes. Pour autant, je ne fus pas particulièrement habité par l’univers de cette musicienne américaine, au contraire du public, visiblement séduit. Peu avant 19 heures, je retourneai devant la Dave Mustage pour y voir l’emblématique Alan Stivell, chantre de la musique bretonne et celtique, qui, sans doute galvanisé par l’excellence de ses musiciens et malgré une qualité de son médiocre, me surprit agréablement, me faisant ainsi oublier sa prestation très moyenne lors de son précédent passage au Motocultor. Peu après, je m’orientai en direction de la Supositor Stage pour y suivre le concert des suédois de Sacramentum, plutôt haut en couleurs dans un bon climat de blackened death metal. Sans transition, je poursuis avec le concert de Deicide : superbe moment débordant d’énergie, pendant lequel les américains jouèrent quelques titres de leur treizième album intitulé Banished By Sin.
Je prolongeai ensuite mon plaisir avec le passage de Venom Inc sur la Supositor Stage. Le trio anglais assura bien son concert, même si une certaine débauche d’effets sonores tendit à alourdir leur prestation. Ce ne fut donc pas leur meilleur concert parmi ceux que j’ai suivis, bien que les musiciens donnèrent clairement d’eux-mêmes. J’enchaîne alors avec le combo anglais Crippled Black Phoenix, dont les passages en France sont toujours aussi rares que remarqués. Leur set du jour ne dérogea pas à la règle : ambiance fantasmagorique, voire onirique (bien servie par sa chanteuse encapuchonnée pour la circonstance) qui sied parfaitement au côté dark rock de leurs titres. Peu après, j’effectuai un nouveau mais bref passage devant la Dave Mustage où se produit Neko Light Orchestra, dont la vision musicale de l’univers des Terres du Milieu touche le public, même si, de mon côté, la richesse du monde créé par J.R.R. Tolkien me paraît à peine survolée. Je clôture cette première journée de festival par le set des californiens de Lionheart qui me laissa de marbre, étant peu sensible au hardcore. Quoi qu’il en fut, le bilan de cette première journée du Motocultor 2024, globalement bon, laissa présager de bons moments pour la suite du festival.
Pascal Druel
(aidé de Maryse Glon)
Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure Louis Lumière, amoureux d’images et photographe au quotidien, j’explore depuis plus de 30 ans la photographie sous diverses formes (prise de vue, développement et tirage argentique, contrôle qualité, repique, traitement et retouche numérique, graphiste, prise de vue, formateur, photographe indépendant). En outre, je collabore occasionnellement avec Chasseur d’Images (magazine pour lequel j’ai été rédacteur pendant une douzaine d’années), signe des ouvrages (publiés aux Editions Eyrolles), réalise de multiples prestations photographiques (books, reportages, mariages) et couvre en images de nombreux festivals et concerts (150 à 200 scènes par an).